Un fournisseur Obscur (Glorien)

À peine Glorien était-il revenu sur Kalaross qu'il avait reçu son communiqué de mission de la part du Bureau de l'Inquisition. Son organisation était en plein démantèlement, ne laissant que les cellules les plus obscures et lointaines encore sous les ordres et accessibles au desperado.

Ses deux gardes du corps étaient présents, attendant dans la pièce calmement, équipés pour faire une guerre sans fin dans les ténèbres de la cité. Deux acolytes de l'Inquisition qui avaient été secondés à Glorien depuis des années.
"Monsieur, plus que quelques jours avant que notre franchise du district dix-huit de Kalaross ne soit démantelée complètement".
"C'est pareil pour la majorité de nos cellules. Les districts un à seize sont déjà fermés, hormis nos cellules fantômes et nos contacts qui sont restés hors des radars"

La seule piste envoyée par le Bureau de l'Inquisition était la suivante: Le matériel signature des agents des Masques Gris retrouvés sur Kalaross est fait par les forges Orthlack de Scintilla, Calixis et provient donc de loin. Glorien doit utiliser ses ressources illégales et non officielles pour pister l'arsenal de type Orthlack et déterminer si le gouvernement du Secteur Calixis est impliqué ou non dans la vente"

Glorien ne cachait pas sa grimace quand son agent lui énumérait les pertes de son empire criminel. Il jouait avec le pendentif de sa main gauche et regardait dans le vide, écoutant à moitier ce que son garde du corps lui disait et calculait ce qu'il lui restait de contact pour faire la mission qui lui avait été confiée. Ce serait sa première mission pour l'Inquisiteru Tharnor et s'il voulait que ce dernier l'ait haut en estime, il lui fallait faire un sans faute.

"Steff, contacte Jargenz. Je veux qu'il dresse la liste de tout ce qui pourrait nous aider à retrouver la trace d'armes de marque Orthlack. Je veux aussi qu'il me trouve n'importe quoi qui se rapporte de près ou de loin aux masques gris. Il nous briefera à notre arrivée."

Steffron Macharius était un homme qui lui avait sauvé la vie plus d'une fois tout le long de sa carrière de baron du crime. Avant d'être garde du corps pour Glorien, il était un tueur à gages. Le desperado l'avait engagé le temps d'un coup important pour son empire et avait convaincu l'Inquisition de le recruter.

"Curth, trouve moi un transport rapide et discret. Nous allons à mon bureau."

L'autre, Curth Klaytus, était un ancien membre de la garde intérieure qui avait été engagé par la très-sainte-inquisition puis transferé comme garde pour Glorien. Il ne voulait pas vraiment parler de son passé et le baron du crime s'était toujours demandé ce qu'il pouvait bien cacher.

Curth acquiesça en un soupir et quitta la pièce sans un bruit, la porte s'écartant sur le côté et laissant entrer l'odeur étouffante de la poussière radioactive qui flotte dans l'air de Kalaross. Steffron, de son côté, se dirigea vers la radio qu'il avait posée sur une table sur laquelle trônaient encore les restes d'un repas oubliés des mois plus tôt par les habitants disparus de l'appartement. La porte avait été défoncée plusieurs fois, prouvant que cet endroit avait été pillé ou fouillé plusieurs fois par des malendrins et sans abris, mais jamais les restes sur la table n'avaient-ils été considérés comme étant d'une quelconque valeur.

Steffron Macharius raccrocha, ramenant son regard froid vers son supérieur.

"Ils nous ont donné rendez-vous dans la ruche bêta, au Salon du Passant" dit-il calmement. C'était un bar huppé que Glorien connaissait très voire trop bien. L'endroit empestait le politicien verreux, le richard qui se la joue criminel et ceux qui ont obtenu assez d'influence par leurs sales coups pour être considérés, l'espace d'un bref moment, comme des égaux par les hauts de ce monde. "Il a réservé la loge 24. Il sera là en jouant le dernier rôle que vous lui avez confié, au cas où les choses tourneraient mal"

Tandis que ses agents faisaient ce qu'il leur avait demandé, Glorien faisait le tour de la pièce, essayant de s'imaginer ce à quoi elle avait pu ressembler. Il fini même par observer les restes sur la tables en se questionnant quant à la nature de ceux-ci.

"Va nous falloir de quoi de mieux à se mettre sur le dos pour aller là-bas" dit-il sans quitter du regard les restes. "On arrêtera chez le vieux Ganval, c'est sur notre chemin."

Il s'agissait d'un couturier respecté et un très bon contact de Glorien. Il faisait souvent affaire avec ce dernier en matière de vêtements et/ou de déguisement, c'est du pareil au même pour le desperado. Tout au long de sa carrière de baron du crime, Havelock avait été généreux et avait financé grandement son importation de matériel et recevait en échange tous les vêtements qu'il désirait très rapidement.

Ils attendirent un moment, regardant la poussière s'élever lorsque des tremblements de terre agissaient le sol ou que des météores frappaient non loin en un hurlement apocalyptique. Steffron, passant ses yeux scintillant de traumatismes multiples, observait les passant dans la rue, son corps étant crispé d'une façon qui trahissait clairement sa nervosité et la vitesse à laquelle il dégainerait ses armes à feu.

Après un certain temps, les passant s'écartèrent, comme surpris par une rare vision, puis un véhicule relativement acceptable dans un milieu huppé de ville ruche, s'arrêta devant la façade du bâtiment. Macharius dégaina son pistolet s'approcha de la porte et fit signe, en langage codé de l'organisation criminelle de Glorien, que c'était Curth.

Il entreouvrit la porte déglinguée et observa la rue, faisant signe d'un regard malsain aux passants de s'éloigner. C'était le moment pour Glorien de sortir dans la rue bondée de passants de toutes les heures.

Glorien, contrairement à Steffron, avait une posture calme et détendue, voire blasée. Il s'était allumé un bâton de lho en attendant son transport. Il souffla la fumée vis-à-vis la météorite qui tombait lentement au loin, ce qui donnait à la fumée l'impression d'être d'une couleur flamboyante. Il observait ainsi la fumée s'éloignée dans l'air pollué de la ruche Irroz tandis que son véhicule s'approchait.

Tiré de ses rêveries par ce qui lui avait semblé n'être qu'un bruit lointain tant il était absorbée par celles-ci. Il se rendit compte par après en regardant Macharius qu'il l'avertissait de l'arrivée de son autre agent. Le desperado rabattu son chapeau sur sa tête, de façon à ce que la majorité de son visage soit plongé dans l'ombre et se dirigea vers le véhicule, sans porter la moindre attention aux passants, tout en restant prêt à dégainer en cas de besoin. Tout juste avant de refermer la portière derrière lui, il jeta son bâton de lho sur le sol.

"Curth, on fait un arrêt chez Ganval. Tu connais le chemin, n'est-ce pas?"

Ils embarquèrent dans le véhicule, Curth Klaytus au volant. Il avait un fusil à pompe d'appuyé sur le panneau de contrôle du véhicule, visiblement armé, et il portait un gilet pare-balles sous ses vêtements amples. Steffron Macharius entra à la suite de son patron, refermant derrière lui la porte et la verrouillant.

Les vitres teintées masquèrent la présence du desperado à la population alors que Klaytus acquiesçait aux ordres de son supérieur, mettant les moteurs pour se diriger vers chez Ganval, traversant les rues poussiéreuses et emplies de centaines de personnes, des gardes locaux écartant la population au passage des véhicules. Ils se rendaient désormais vers la boutique de Ganval, laquelle était située dans les niveaux supérieurs de la ville, les faisant monter des côtes d'acier sous lesquelles se trouvaient les ouvriers et populations de mutants du sous-monde.

"Je sens mal cette mission, patron" fit Steffron, éjectant le chargeur d'un pistolet et l'y glissant de nouveau.

Le desperado regardait le décor défiler devant ses yeux pendant la majeure partie du trajet.

"Je sais. Tu les sens toujours mal, les missions. T'es payé pour ça, mal les sentir. Qu'est-ce que je ferais d'un gars du corps qui se dit: Y'en a pas de problème, y'a rien de mal qui peut arriver... Continue d'être prêt au pire, c'est le meilleur conseil que je peux te donner."

Havelock tapota le pendentif qu'il gardait constamment dans sa poche, comme à chaque fois que quelque chose le tracassait. Il restait attentif à ce qu'il voyait dehors et à ce qu'il pouvait entendre. Bien qu'il savait être patient, il avait hâte d'arriver chez Ganval et d'aller rejoindre Jargenz, pour commencer la mission réellement.

Ils arrivèrent dans les quartiers huppés en soulevant une nappe de neige orangée, les citoyens tout autour s'écartant face à l'arrivée inattendue d'une voiture. Des gros bras, engagés par certains exploitants locaux qui avaient à coeur les domaines spécialisés de leurs employés, amenèrent leurs mains à la poignée de revolvers ou de fusils passés en bandoulières. Ils portaient des insignes de gang.

Il s'agissait des Fils de la Rouille, un petit gang mineur avec lequel Glorien avait déjà fait affaire mais qui n'avait rien de particulièrement intéressant à offrir sauf ses bras et ses balles pour quelques trônes.

Klaythus sortit du véhicule et passa son fusil sur son épaule d'une façon décontractée. Malgré tout, son attitude et la raideur mécanique qu'il cachait au sein de ses vêtements trahissait toute son expérience de militaire prêt à bondir au moindre signe suspect. D'un regard glacial, il convainc les gardes de s'éloigner de le laisser vaquer à ses occupations alors que ceux-ci faisaient mine de dégainer. Il amena ensuite son regard sur la vitre teintée où se tenait Steffron et acquiesça.

Steffron poussa la porte, dégainant son arme d'une main plus nerveuse, et regarda autour de lui, faisant signe à Glorien de sortir.

Les yeux couvert de son chapeau, Havelock sortit du véhicule. Son grand manteau étant détaché, on pouvait facilement voir le pistolet de duel attaché à sa boucle de ceinture ainsi que les quatre crosses de les deux crosses sous ses aisselles et les deux dernières sur ses cuisses. Il avançait d'un pas calme et détendu, laissant ses réflexes faire le travaille quand vient le temps de sortir les armes.

Glorien connaissait assez bien le chemin et se dirigea droit vers la boutique du vieux Ganval.

La porte grinça, poussée de la main de Steffron qui tournait le dos à l'intérieur de la pièce, son arme braquée sur l'extérieur comme entité générale, comme s'il semblait s'apprêtait à affronter les spires titanesques de la cité, les couloirs infinis de bâtiments intereliés et les bidonvilles qui s'accumulaient entre les tours comme autant de cancers généralisés.

Klaythus, lui, fut à l'intérieur avant son maître, son regard fin détaillant la moindre chose dans la pièce. Une clochette sonna et un vieil homme arriva. Les yeux bridés, le visage tanné par l'exposition à la pollution, ses vêtements amples trahissaient néanmoins la finesse de sa main.

"Mon cher Havelock, voilà un moment que je ne t'avais pas vu..." dit-il en faisant un sourire amical mais réservé. Il posa ses deux mains agiles sur son comptoir et regarda les deux gros bras qui entraient à ses côtés, guère surpris de leur présence.

Glorien entra, s'approcha du comptoir et y déposa son chapeau. Il rendit le sourire au vieillard et passa une main dans ses cheveux, comme à chaque fois qu'il se décoiffait.

"Ganval! Ça me fait plaisir de te voir, mon ami. Je ne serai pas long. Je dois me rendre à un endroit et mes amis et moi-même n'avons pas de tenue appropriée. J'ai besoin de trois ensembles des vêtements qui pourraient convenir à un politicien. C'est possible?"

Il prit dans ses poches son paquet de lho et s'en alluma une. Il regarda à l'intérieur du carton. Merde, plus que trois pensa-t-il. Pourquoi n'y avait-il toujours pas de carton de lho sans fond où les bâtons apparaissent à l'infini, se demanda-t-il.

En un éclair, ses bras tirèrent un galon de ses poches et il s'avança vers Havelocke sous les regards suspicieux de Steffron et Klaythus. Il prit les mesures du desperado, puis celles de ses porte-flingues. Lorsqu'il eut terminé, il acquiesça.

"Je dois avoir ce qu'il faut en stock. Est-ce que vos collègues doivent être aussi habillés comme des politiciens, ou des riches gardes du corps?" demanda-t-il, un sourire discret aux lèvres, celui qui laissait chaque fois à savoir que le vieil homme avait percé ses manigances. Mais Ganval était une pierre tombale, rien ne sortait de sa bouche.

Habitué de se faire mesurer de la sorte quasiment à chaque fois qu'il rendait visite, Glorien s'était laissé faire et avait levé les bras pour aider le vieillard à prendre ses mesures. Il fit un sourire accompagné d'un hochement de tête pour faire comprendre à ses hommes qu'ils pouvaient le laisser faire.

"J'ai pas trop engraissé?" demanda-t-il avec un sourire. "Pour eux, je crois que le style garde-du-corps leur conviendrait parfaitement."

Il prit une pose, laissant le temps à Ganval d'aller chercher ce qu'il lui fallait. Il en profita pour prendre quelques inspirations de sa cigarettes et inspecter rapidement les lieux pendant se temps. Il cherchait ce qu'il y avait de changé depuis la dernière fois qu'il était venu. Prenant une autre pouffé de lho, il se chercha un objet qui pourrait faire office de cendrier.

"Les affaires vont bien?" demanda-t-il amicalement.

Glorien savait qu'il fallait entretenir de bonnes relations avec ses contacts. On ne sait jamais quand est-ce qu'on sera prit dans la merde et les bons amis peuvent vous aider à en sortir plus facilement.

Son interlocuteur prenait les mesures sans problème.

"Non. Pas trop" dit-il en montrant ses vieilles dents jaunies mais serties de diamants. Il acquiesça aux demandes de son client puis revint avec des vêtements appropriés aux mensurations de chacun. Les vêtements de gloriens étaient d'un bleu ciel exquis, rappelant ce ciel que plus personne ne verrait jamais, avec elles venaient une paire de bottes longues montant jusqu'au mollet et sur lesquelles s'attachaient la boursoufflure des bas de pantalons. Un long manteau se portait sur sa chemise bouffante, laquelle scintillait de multiples joyaux, et le par-dessus en lui-même était dotée de multiples pierreries.

Les vêtements de ses collègues étaient plus humbles et plus simples, mais les gants de cuir doublés de plaquettes d'argent, la ceinture à holster de fine qualité et le manteau long à multiples poches qu'ils portaient allaient de paire avec celui de leur protégé tout en étant clairement inférieurs en qualité et statuts à celui de leur employeur.

Havelock arqua le sourcil à la vue de la couleur des vêtements. Il douta un peu de la couleur, mais il finit par se dire que l'expert était Ganval et que lui ne l'était pas. Et puis, depuis toutes les années où il avait demandé au vieil homme de lui préparer des vêtements, il n'avait jamais été déçu. Par contre, il trouva dommage que les affaires de son ami allaient mal. Il s'en doutait, puisque son organisation était le principal investisseur et que, pour l'organisation aussi, les affaires allaient plutôt mal.

"J'espère que tu sauras t'en sortir. J'aimerais bien t'aider, mais je ne peux pas, pas maintenant en tout cas." Il regarda autour de lui.
"Y'a un endroit où on pourrait se changer? Au fait ça fait combien?" demanda-t-il en fouillant dans ses poches pour trouver de quoi payer son dû.

Ganval éclata d'un rire tranquille.

"Bah oui, vous pouvez y faire quelque chose, prenez du poids et perdez-en, ça va affecter ma réponse la prochaine fois que vous posez la question" fit-il avec un sourire en coin. "Mais oui, mes affaires vont bien, et pour le paiement, pas besoin, le nombre de fois que vous m'avez rendu service, je peux bien vous fournir quelques vêtements"

Il indiqua la pièce voisine, laquelle donnait sur six petites chambres pour que les gens se changent.
"Allez voir si tout y est"